Humeurs...
Humeurs...
La vérité, c’est que Lily est en panne. Ça nous est arrivé, un peu comme ça sans le vouloir. La panne sèche. L’angoisse de la page blanche. Alors, Lily va très bien, aucune inquiétude à ce sujet. Elle roucoule ses amours tranquilles devant la maison entre deux expéditions pas très légales avec beaucoup trop d’enfants sur le siège avant. La vérité, c’est qu’entre fiction et réalité, Lily ne savait plus trop bien où elle en était. L ‘émotion, je vous dis, l’émotion. Alors, d’un accord unilatéral, elle a décidé de faire une petite pause... Histoire de prendre le temps de vivre un peu. Sa caboche explosait, faux dire, on n’arrête pas une minute ici. Enfin, ça dépend des jours. Mais, c’est toujours bien d’écrire ça. Si, je disais que je vais souvent dans les cafés, vous penseriez tout bas : « elle fout rien, c’est beau le sabbat ». Et, bien, détrompez-vous, tout se passe au café ici ! Une bonne leçon d’art de vivre pour nous, petits français. J’ai trouvé des gens encore moins stressés par le boulot ici. C’est dire. Parfois, j’en bouillonne un peu, avouons-le.
En attendant que Lily revienne, je propose de vous livrer quelques anecdotes... C’est pas que je m’ennuie de vous mais un peu quand même. Parce qu’ici, avant que quelqu’un rigole d’une blague, j’en ai pour 5 minutes de traduction anticipée... Autant dire que je fais souvent chou blanc ! Mais le cœur y est. Et moi, je rigole dans ma barbe. Certains intellectuels avertis disent qu’on peut perdre sa langue maternelle. Ça me ferait bien chier car les gros mots les meilleurs, c’est en français. Autrement, quel interdit transgresserions-nous ?
En parlant d’interdit, ce matin, j’ai dit au général que son autorité il pouvait se la carrer... Je m’ennuyais ferme, il y a des jours comme ça, on ne vous file pas de mission. Après une brève et désespérante lecture de nos faits d’armes chez nos amis canadiens à essayer de comprendre pourquoi les américains sont encore les plus forts, j’ai décidé de façon unilatérale, comme Lily, que j’allais me faire la malle. Alors, en bonne franchouillarde têtue, j’ai rouspété mais ai filé en douce. Juste murmuré un « ciao » puis ai dévalé les escaliers. Evidemment, j’exagère toujours mes histoires. Mais le fond est là. Certains jours, j’aimerais les passer en entier dans l’autre centre avec les enfants handicapés. Ils m’épuisent mais je m’éclate bien. Et puis, moi et l’autorité façon garde à vous, ça a jamais trop marché. Je vide un peu le panier, il est gentil et épatant au fond le général. Et on fait du bon boulot. Les enfants sont contents de venir aux ateliers. Je me creuse bien la cervelle pour eux. Alors, ce matin, j’ai pris la poudre d’escampette. Un petit goût d’école buissonnière. Pour aller au musée. D’autant, qu’ici les musées, il faut la jouer serré, fermeture obligatoire à 14 heures. Sauf, le dimanche où c’est fermeture toute la journée. Que n’y ai-je pas trouvé ? Des jouets, des beaux costumes, des décors de rêves. Les intérieurs traditionnels d’ici, avant que les austro-hongrois ne viennent mettre leurs grains de sel dans les affaires ottomanes. Finalement, tous les enfants du monde jouent à cache-cache, la ronde enchantée, chat ou attrape-moi, je suis perché. Quelques petits oiseaux bricolés, un pistolet en bois, la gâchette en forme de clou rouillé. Parfum d’enfance.
Hier, entre deux parmi les cinq cents fois où j’ai dû épeler mon prénom, une jeune fille trisomique m’a appris à tricoter. Ce n’est pas folichon encore, mais si une âme généreuse achète un jour mon écharpe, je serai vachement vachement vachement vachement fière ! A la fin, elle m’a juste donné un baiser. Quel doux baiser, j’en ai rougi de plaisir.
Foi de Lily, c’est pas permis !
Bon, les amis, la petite pensée du jour... J’en ai pas vraiment mais tant pis.
Mais, j’ai bien envie d’un café...